La Cathédrale fondue.

Un fondu enchainé.

La Cathédrale de Reims.

En un fondu déchainé, le cercle de feu rompt le cercle de fer.
La sainte voute millénaire plie et se brise en écailles de pierres, An mille langues de feu sacrées et de mitrailles meurtrières.
Elle s’était bien trop voutée, à force de se courber, la vieille.

Elle s’enfuit alors en une dernière révérence, fière de son prestigieux passé et de son noble présent.
Maints rois et princesses perdent par cette nuit sombre leur manteau de légitimité séculaire et la sainte protection accordée. Trente-trois !... Rois furent couronnés en ce Saint lieu. Jeanne d’Arc y fit même une apparition !

Larmes de plomb, larmes de douleurs et larmes de pleurs s’éc®oulent en un dernier hommage à la grandeur achevée.

 La Cathédrale de Reims est en feu !

La Cathédrale s’incline au centre de la ville ouverte, de la ville offerte.
En un immense brasier, feu de joie en barbarie et de Saint-Jean inutile, l’Obusier grossier accompli son œuvre de destruction.
Le barbare à pointe vomit son flot de haines et de bêtises.
La grosse… Berta s’entraine et éructe son explosif d’acier.
Elle érupte de la Krupp, joliment.
Une Qualité allemande.
Vomissures de honte; serre les dents ! Tu garderas ainsi soit-il, le meilleur pour toi !

A 7 heures 45, le 19 Septembre 1914 l’artillerie allemande bombarde la Cathédrale de Reims.
Des lueurs nocturnes entr’aperçues dans une des tours firent penser que des observateurs mal intentionnés épiaient, alors que Reims était décrétée Ville ouverte.
A 17 heures la Cathédrale est en feu.

Les Barbares sont aux portes de la Ville.

Le premier Obus au but explosa sur la tour Nord de l’édifice. Puis deux heures plus tard deux obus ruinèrent la toiture. Ne subsista de la splendeur primitive qu’une carcasse de pierres martyrisées.

Alfred Wolff l'Alsacien raconte,
« L’on se regardait stupéfait ! Les incroyants pleuraient et les femmes maudissaient ».
« Le vent soufflant rabattait le feu sur l’Archevêché et les maisons contiguës… ».
« La chaleur produite nous cuisait le visage et le bruit fait par cet ouragan de feu était semblable à une mer déchainée… ».

Et un vent de tempête sonnait à toute volée… et ils nous les ont volées !

Le plomb en ébullition des feuilles qui recouvrent la toiture coule à plein ruisseau sur les voûtes, dans les chéneaux et par les gargouilles.

Une vision de cauchemar.

19 septembre 1914 : la cathédrale de Reims bombardée, incendiée...
19 septembre 1914 : la cathédrale de Reims bombardée, incendiée... par Daniel Pellus Le 19 septembre 1914, des hauteurs de Brimont, Berru, Nogent-l'Abbesse, Cernay où ils ont pris solidement position, les Allemands commencent à bombarder Reims. Un bombardement systématique, implacable, qui va durer huit heures.
http://www.editionsfradet.com/la-cathedrale-de-reims-dans-l-histoire-1914-incendie.html
http://www.editionsfradet.com

" Les échafaudages de bois du grand portail sont en feu atteint à 15 heures par un obus et la tour aux cloches se désagrège…

Le clocher de l’Ange, dénommée carillon est progressivement gagné par les flammes…"

Henri Matot, qui avait 12 ans à l’époque, a gardé le souvenir très précis de cette journée qui a marqué son enfance : « Tout le quartier brûlait. Les statues de la cathédrale semblaient se tordre de douleur. Je regardais la toiture de l’édifice se consumer. C’est une vision que je n’oublie pas.»

La forêt de bois de châtaigniers, la charpente majestueuse portant la couverture s’évade en une dense fumée dans une danse macabre sans pardon. 

Dans les jours précédents, la Cathédrale au sol couvert de paille recueillait 150 blessés allemands en provenance du front si proche; simple fidélité à la tradition d’asile et d’accueil de l’édifice généreux.

Depuis trois jours le drapeau de la Croix-Rouge flottait vaillamment au sommet de la tour Nord, fragile rempart à l’aveuglement humain. 

Bientôt les flammes s’engouffrent dans la nef, attaquent les portes, se communiquent à la paille qui jonche le sol de la cathédrale et sur laquelle reposent des blessés allemands. C’est la panique. Mais les Allemands, que la foule veut massacrer, sont sortis de l’édifice et sauvés grâce à l’intervention énergique des abbés Landrieux, Thinot et Andrieux.

« Une première fois, la porte du portail St Sixte s’ouvre, la tête du convoi de blessés apparaît, mais recule dans le tambour, voyant les soldats prêts à faire feu, le public s’amasse et devient houleux, méchant, il y avait de quoi, les soldats et nous policiers, l’agent Braille 35 et un autre régulier, comprenons l’inutilité de fusiller ce tas d’éclopés qui tous marchent péniblement, et ne songent qu’à quitter ce lieu de désolation bombardé par les leurs, et aller ailleurs, où ? … ».
Le tailleur Alfred Wolff. Témoin. 

Putain de guerre. 1914-1915-1916. TARDI et VERNEY. Edition CASTERMAN.

Exposition, la Grande Guerre. Musée de SOUVIGNY. Année 2014. Artilleurs Allemands. Le Brutal fait mal !

 Une puanteur à vomir …

Comme en la cathédrale ! (réflexion de Mr Havot maître sculpteur de N.D), une puanteur des plaies non soignées s’exhale en ces 3 pièces, c’est à vomir, dans la pièce aux papiers située derrière le bureau, plusieurs sont là couchés, dans un coin il y en a un qui ne se gêne pas pour tempêter contre son Empereur qui a déchainé une guerre aussi terrible, il ne se gêne pas de dire son mécontentement, il jure des « Donerweder », contre tous les dirigeants allemands, les autres ne soufflent mot, et le regarde avec terreur en songeant sans doute que les chefs voisinant l’entendent.

Il y a aussi un vigneron du Rhin qui m’exalte la beauté de nos vignes, il est sans coiffure. Je lui dégotte une vieille casquette, qu’il est heureux de mettre, il me remercie avec effusion.

Mais le boche (sans pied gauche) délire toujours, il réclame sans cesse son soulier pour aller voir sa sœur qui l’attend, cette vision de pied emporté par un éclat d’obus lui a sans aucun doute frappé l’esprit, elle lui revient terriblement. Le docteur réclame une cuvette, avec de l’eau, il donne quelques soins indispensables aux siens ». Le tailleur Alfred Wolff. Témoin. 

Reims1418.wordpress.com. 1418 Reims dans la grande Guerre.pdf.

La bataille de la Marne du 6 au 12 Septembre 1914 contraint les troupes allemandes à quitter Reims le 12 Septembre. Elles s’installent dans les forts de Brimont, Witry-les-Reims, Berru et Nogent-l’Abbesse.

"Si nous sommes obligés de reculer et d’évacuer Reims, nous détruirons la cathédrale".

Exposition, la Grande Guerre. Musée de Souvigny. Année 2014. Artilleurs allemands équipés de masques anti-gaz.

Ainsi fut impitoyablement bombardée la ville de Reims durant quatre longues années. Une maison sur deux fut détruite.

Alors un immense chantier de dix-neuf ans s’ouvrit porté par la solidarité de tout un pays.

Rockefeller, le milliardaire américain s'associa largement à ce renouveau.

La charpente détruite dans l’incendie fut redressée en béton-armé selon la technique traditionnelle des charpentiers de l’an mille. Une première où le béton remplaça le bois.

Ainsi fut inaugurée en 1938 la ville nouvelle dans sa blanche robe art-déco. De décors floraux de style balnéaire en mosaïques et marqueteries, de ferronneries en verrières splendides, la ville se releva obstinément...

Les morts, non.

Ce matin du 20 septembre, deux journalistes après avoir parcouru à vélo les 35 kilomètres séparant Epernay de Reims relatent en ces termes le premier regard porté sur la Cathédrale.

Albert Londres, grand reporteur et sa fille Fleuris; à Vichy.

Albert Londres, une vie de reporter

Albert Londres, qui voulait devenir poète, est l'un des plus grands journalistes de son époque et une référence pour de nombreux reporters à travers le

http://geopolis.francetvinfo.fr

« … Nous suivons la même route que le jour où nous la vîmes entière.
Nous comptions la distance, guettant le talus d’où elle se montre au voyageur, nous avancions, la tête tendue comme à la portière d’un wagon lorsqu’en marche on cherche à reconnaître un visage.
Avait-elle conservé le sien ?
 Nous touchons le talus. On ne la distingue pas. C’est pourtant là que nous étions l’autre fois. Rien. C’est que le temps moins clair ne permet pas au regard de porter aussi loin. Nous la cherchons en avançant.
La voilà derrière une voilette de brume. Serait-elle donc encore ?

L’élégance du chapeau alliée à celle l’oreille. Albert Londres, posant à son bureau.

Le grand Reporter mourut dans l’Incendie du paquebot « le Georges Louis Philippard ».
Certains ont évoqué un incendie criminel perpétré dans le but d’effacer les informations portées par Albert Londres alors de retour de Chine. La légende raconte qu’il aurait été bloqué par un livre enfuit dans une poche de sa veste, au passage d’un hublot lors de la fuite du navire en feu…
Qu’en fut-il exactement ? Nul ne le sait. 

Les premières maisons de Reims nous la cachent. Nous arrivons au parvis.
Ce n’est plus elle, ce n’est que son apparence.
C’est un soldat que l’on aurait jugé de loin sur sa silhouette toujours haute mais qui, une fois approché, ouvrant sa capote, vous montrerait sa poitrine déchirée.
Les pierres se détachent d’elle. Une maladie la désagrège. Une horrible main l’a écorchée vive… ». Albert Londres. 1914. Reims.

Baylot Michel. Photographie. Prothèse de zinc en remplacement de la pierre.

Ce texte révéla au monde l’immonde.
La magnifique Cathédrale de Reims, chef d’œuvre de l’art gothique du Moyen-âge fut construite sur une période de 300 ans (1211 - 1516).
Elle évoquait la magnificence de la Jérusalem céleste dans l’imaginaire de ceux de l’An mille.
Elle portait l’autorité de l’Archevêque sur plusieurs diocèses de la région Nord de la France.
Elle consacrait les Rois de France et les légitimait.
Et elle mourut le 19 septembre 1914, en une nuit.

L'Incendie du Georges Louis Philippart. Le 16 Mai 1932.

Réconciliation, chantions-nous dans les Eglises avec cœur. Mais avec Qui ?
Avec Robert Williams… le chanteur de gospels, qui se ramassent à la pelle.

Ainsi le pire côtoie le meilleur, sur cette planète.
Nous ne le savions pas.

BAYLOT Michel. Le 12 Avril 2015. J'ai le coeur en feu. http//www. Baylotmichelblog.canalblog.com

Folie.

Suite à une suite de revers militaires sérieux, l’armée allemande progressivement s’enterra dans les tranchées du Nord.
L’armée française, après de très, très lourdes pertes fit de même.
Dès lors la guerre s’éternisa durant quatre longues années dans une profonde saignée mêlée, à la souffrance partagée impardonnable. 

La Nef de la Cathédrale de Reims.
Les deux rosaces superposées (une originalité architecturale) ont été épargnées de la destruction. Mur Nord de l’édifice. Photographie internet.

BAYLOT Michel. Photographie. Essaye-t-il toujours d’éteindre l’incendie ?
Il devient nécessaire de lui dire que nous sommes en paix avec la Nation allemande... depuis 70 ans. Mais le bouchon a sauté trop loin !

BAYLOT Michel. Photographie. La petite Rosace. Façade Nord. Merveille de couleurs du XVe et XVIe Siècle.

La pierre de Champagne garde dans ses chairs la trace du terrible incendie.

Une Trace émouvante formée de la main même de Jeanne d’Arc… un des précieux trésors de la Cathédrale.

Le poisson; le Symbole primitif des Chrétiens d’Orient.

Le vin. Il n'y a pas que les nourritures célestes à célébrer dans une Cathédrale.

BAYLOT Michel. Photographie. La Cathédrale renait dans sa couleur de Printemps.

La Cathédrale de Reims et ses deux tours tronquées. Photographie Internet.

La douce vallée de la Marne et le vignoble Champenois.

La colline champenoise s'est ici coiffée d’un Moulin… à visée publicitaire.

Plus traditionnellement un petit bosquet culmine sur les collines arrondies de la région.

Le mont avoisinant s’est quant à lui équipé d’un Phare… à visée publicitaire; le phare de Verzenay. Cependant aucune mer ne scintille à l'horizon; quoique...

BAYLOT Michel. Photographie. La colline de VERZENAY. Champagne.

Mais la guerre ne se livre pas seulement en surface par échanges de moulins et de phares ou de foutre; Fichtre ! de Foudre… mais aussi sous terre où s’affronte résolument de profonds savoir-faire. Mais c’est de bonne guerre !  

Ainsi le paysage de champagne se divise spontanément en trois strates successives; la végétation dense des bords de Marne, les vignobles et les champs intermédiaires amicalement  pentus et la forêt en houppette qui préserve l’humidité et de l’érosion du sol.

Seule la Montagne de Reims résolument s’est couverte de forêts en massifs contigus, en une concurrence légitime des vignobles argentins adjacents.

Cependant la quatrième strate, la plus discrète et la plus profonde se ramifie en des distances inconséquentes et accueille généreusement le pétillant et la bulle.

Ainsi un des essentiels est tapi sous terre… ici la Cave des Champagnes MERCIER; et les Autres. Tous les Autres...

Cependant bien loin de la surface et bien à l’écart des coinceurs de bulles pétillants, des originaux passionnés récoltent le long des tunnels de sédiments tendres d’étranges animaux aux carapaces fossilisées. Ils recueillent les souvenirs fascinants de la mer ancienne qui habitait ce Pays, autrefois.

… et de la Terre jaillit le vert amande des Primevères en un coucou nous revoilà, et déjà le renouveau... la vie est pressée.

... tandis que l'Ange de la Cathédrale souri à la paix revenue.

BAYLOT Michel.
« L’art statuaire champenois est un art aimable ».

Comments

[Pierre]

Merci pour cet article très complet sur la cathédrale de Reims. Je croyais bien connaître cet événement, mais beaucoup de détails m'étaient inconnus !